(Laurette Mugnier, Savoie)
Le 3 août 2005,
A notre arrivée à Kobé, nous sommes attendus par un groupe de pacifistes de la ville.
Après le repas, les échanges commencent par les souhaits de bienvenue et la présentation de la délégation française.
C’est le président de l’Association des Médecins contre le Nucléaire ( 6700 médecins et dentistes de la province de Kobé adhèrent à cette association, 100 000 au plan national) qui ouvre la discussion en nous parlant de son père également médecin : pendant la guerre, il travaillait pour l’armée japonaise et il était en service à Hiroshima. Il ne fut ni irradié ni blessé au moment du bombardement parce qu’il se trouvait hors de la ville à ce moment-là ; par contre , il fut parmi les premiers médecins qui ont soigné les victimes tout de suite après l’explosion.
Joël Frison rappelle les nombreuses initiatives pour la Paix, remercie les amis japonais de leur accueil chaleureux.
Dany Allaire, membre du Bureau National, intervient pour redire notre attachement à la lutte pour le désarmement nucléaire. Il rappelle que, chaque année depuis 1995, au moment où le Président Jacques CHIRAC autorise la reprise des essais nucléaires français, une délégation du Mouvement de la Paix a été présente à Hiroshima. Cette présence régulière permet de renforcer la lutte contre l’arme nucléaire et de créer des liens solides avec les pacifistes des autres pays, notamment du Japon. Il revient sur les différentes initiatives du Mouvement de la Paix en faveur du Désarmement Nucléaire, de la défense du T.N.P. et de la lutte pour le rendre encore plus ambitieux ( pré-conférences de Genève, de New-York, la campagne de signatures, l’importante délégation à New-York début mai 2005) .
La conférence de révision du T.N.P. n’a pas répondu à nos espoirs mais elle a permis des rencontres avec des représentants des états nucléaires et non nucléaires à qui il a été demandé des comptes sur les engagements pris il y a 20 ans. Une rencontre a été également possible avec la délégation officielle japonaise.
L’intervention se termine sur l’urgence à développer l’action contre l’armement nucléaire (alerter l’opinion, montrer les dangers, intervenir dans les écoles et auprès des jeunes).
Le responsable du Gensu Ikyo, équivalent du Mouvement de la Paix, revient sur les premiers contacts qu’il a eu en 1991 avec les pacifistes de Rennes et sa participation à une conférence à Brest dont l’objectif était d’obtenir la dénucléarisation de la zone maritime.
Il expose ensuite la « méthode Kobé » : à la fin de la guerre et jusqu’en 1974, le port de Kobé est utilisé comme base militaire par les Etats-Unis ( guerre de Corée, du Viet-nam). A cette date, la gestion du port, jusque- là assurée par l’Etat, revient à la Municipalité ; le Conseil Municipal de gauche prend alors une résolution interdisant l’accès de tous les bateaux de guerre chargés d’armes nucléaires. Depuis aucun d’entre eux n’est entré dans le port de Kobé. Ce n’est pas les cas pour les autres ports du Japon.
La « méthode Kobé » a réussi grâce à la force et à la détermination des habitants ainsi qu’à l’élection d’un Conseil Municipal majoritairement de gauche.
Actuellement, de très fortes pressions sont exercées par le gouvernement japonais et ses amis Américains. Des craintes se font jour à la veille des élections municipales qui auront lieu à l’automne : cette décision, vieille de 30 ans, pourrait être remise en cause si la majorité de gauche n’était pas reconduite.
A une question sur les conséquences actuelles des bombardements sur Hiroshima et Nagasaki, tant sur la santé des descendants des Hibakushas que sur l’environnement, les deux médecins ( l’un pédiatre et l’autre généraliste) insistent sur la situation difficile des Hibakushas (santé, chômage) : ils ont besoin d’un suivi rigoureux et régulier, il faut obtenir pour eux la reconnaissance des dommages qu’ils ont subi et une indemnisation qui leur permette une vie plus facile.
Les deux intervenants ne pensent pas que, de nos jours, les habitants des deux villes aient encore à craindre pour leur santé du fait des bombardements de 1945.
Le danger réel, c’est l’existence aujourd’hui dans le monde, de milliers de têtes nucléaires beaucoup plus puissantes que celles d’Hiroshima et Nagasaki dont l’utilisation dans un conflit nucléaire causerait à coup sûr l’éradication de la vie sur terre.
La vice-présidente de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Kobé, également présidente d’une association pacifiste remet à chacun d’entre nous une grue en cuivre, symbole de la lutte pour la vie et l’espoir.
Nous connaissons un moment d’émotion très intense quand Makoto KEMMOKU, professeur de français et poète, lit des poèmes écrits en 1952 par des enfants d’Hiroshima, témoins et victimes du bombardement.
Une remise de cadeaux de la part des pacifistes français et une séance de photo devant les deux banderoles de Kobé et l’arbre de la Paix de Port-de-Bouc terminent cette rencontre riche d’informations, de chaleur et d’émotion.


