Dès notre arrivée à Vienne, après avoir posé nos valises, nous nous rendons à la conférence organisée par ICAN Monde dans les locaux de l’Académie Diplomatique de Vienne, mise à notre disposition par le gouvernement autrichien.
ICAN est l’acronyme de International Campaign to Abolish Nuclear weapons ; en français, Campagne internationale pour abolir l’arme nucléaire. Elle a été lancée il y a 5 ans lors du premier comité préparatoire du cycle de Conférence 2010 du TNP. La campagne en France regroupe un collectif de 63 organisations ; elle est coordonnée par le Mouvement de la Paix.
La Conférence ICAN de Vienne montre un développement important de la campagne internationale dans de nouveaux pays, associant de nombreux jeunes et marquant un renouveau du mouvement abolitionniste.
L’ordre du jour est chargé et nous entrons directement dans le vif du sujet avec une présentation de certaines campagnes nationales (Pays-Bas, Australie, Norvège).
Ensuite, place aux ateliers, répartis en deux séances le samedi après-midi et dimanche matin :
– Impulser de nouveaux partenariats à partir des conséquences humanitaires catastrophiques des armes nucléaires,
– La campagne ICAN de désinvestissement industriel et financier
– Construire une zone libre d’armes nucléaires au Moyen-Orient
– Les leçons du succès des campagnes internationales pour l’abolition des mines antipersonnelles et à sous-munitions ; comment s’en servir pour avancer ?
La matinée de dimanche a été pour une part consacrée à la préparation des travaux du TNP par Reaching Critical Will, le programme dédié de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté. Ray Acheson a rappelé rapidement l’histoire du TNP avant de s’attarder sur le succès de 2010 et les engagements contenus dans le plan d’action adopté.
L’ambassadeur d’Autriche, Alexander Kmentt nous a ensuite accueillis sur ses terres avant de laisser la place aux comptes-rendus des ateliers. Il a rappelé l’engagement ferme de l’Autriche vis-à-vis des pays nucléaires, réaffirmant que la patience de l’Autriche aurait ses limites et que son pays n’hésiterait pas à engager un processus avec les Etats disponibles en cas de trainements de pieds manifestes des différents protagonistes.
La journée s’est terminée par un grand débat sur la stratégie à mettre en place (introduction d’Arielle Denis) et sur l’organisation même de la campagne (introduction de Tilman Ruff). L’objectif global est que les négociations pour la Convention d’élimination aient démarré avant la conférence de 2015. S’appuyant sur l’engagement nouveau du Comité international de la Croix Rouge, l’accent est mis sur les nouvelles approches à mettre en place pour le désarmement nucléaire. « Ne faut-il pas changer de « terrain de jeu », ne pas se confiner au terrain des dimensions militaires et stratégiques des armes nucléaires mais poser aussi le problème de leur « inacceptabilité » morale et humaine, en regard notamment des conséquences humanitaires catastrophiques qu’elles auraient pour les populations d’une région, d’un continent ou de la planète entière ?[…] Ce nouvel intérêt pour les conséquences humanitaires de l’usage des armes nucléaires, ajouté au traumatisme après la catastrophe de Fukujima, les partenariats qui se développent entre sociétés civiles, Etats non-nucléaires, engagements de parlementaires et d’élus pour créer les conditions de l’interdiction de l’arme nucléaire, font dire à une chercheuse comme Rebecca Johnson […] qu’il est temps de se tourner vers une nouvelle approche : celle du “désarmement humanitaire”. Donc, comme cela a été fait et réussi pour les mines antipersonnel, poser le problème sur le plan du droit international humanitaire et lancer un processus de pression citoyenne et de négociations multilatérales sans attendre le consensus de tous les Etats… » (source : Daniel Durand : http://culturedepaix.blogspot.com/2012/04/vienne-2012-nouvelles-strategies-pour.html). De ce point de vue la Conférence sur les conséquences humanitaires accueillie par le gouvernement de Norvège au printemps 2013 apparaît comme une étape primordiale.
Pierre Villard, président du Mouvement de la Paix et coordinateur de ICAN pour la France, s’est félicité du lancement de ce débat stratégique et structurel de la campagne internationale, indiquant que les mêmes questions se posent au niveau national. Remerciant fortement l’Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire (IPPNW), il a fortement insisté sur la nécessité d’aider l’IPPNW à élargir la campagne.
Le débat a mis l’accent sur les nombreuses opportunités afin de créer cette pression : le premier comité préparatoire à la conférence d’examen du TNP de 2015, qui a lieu à Vienne du 30 avril au 11 mai 2012 ; le sommet de l’OTAN des 20-21 mai à Chicago, la journée internationale d’abolition des armes nucléaires le 02 juin, la journée mondiale de la paix du 21 septembre, la première session de l’Assemblée Générale des Nations Unies, la Conférence pour une Zone Exempte d’Armes Nucléaires au Moyen-Orient, la conférence du Comité International de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires, qui doit se tenir avant la fin de l’année.
De plus, ICAN demande aux ONG engagées dans la campagne de solliciter les représentants des missions présentes au TNP afin qu’ils intègrent dans leur déclaration la référence aux conséquences humanitaires catastrophiques des armes nucléaires et la nécessité d’un traité aboutissant à un monde sans arme nucléaire. Enfin, il est demandé aux missions de s’engager pour que les négociations d’une future convention démarrent avant 2015.
(photos signées Nathalie Gauchet)
A consulter aussi :
– La composition de la délégation
– Conférence ICAN des 28 et 29 avril 2012
– Les activités des ONG
– Les compte-rendus des rendez-vous avec les ambassades
En construction :
– Les positions des principaux pays lors du débat général


