« Les défis pour la paix de la rentrée 2007-2008 »
Conférence de presse du 20 Septembre 2007 – Communiqué de presse
Madame, monsieur,
Depuis leur entrée en fonction il y a quelques mois, le président de la République et le nouveau gouvernement multiplient les déclarations, les projets et les actes en matière de défense, de sécurité et de relations internationales.
Le Président engage des orientations importantes qui vont marquer durablement le positionnement de la France. Il estime que « des choix décisifs pour la défense du pays vont devoir être opérés », et charge une commission de rédiger un Livre blanc pour mars 2008 destiné à encadrer la politique de défense pour les 15 prochaines années sur la base de ces orientations.
Le Mouvement de la Paix s’inquiète de certains aspects de ces déclarations qui suscitent des questions voire des inquiétudes, ou comportent des contradictions.
Rappelons qu’en juin dernier, au moment même où s’installait le nouveau gouvernement avec la nomination de Hervé Morin ministre de la Défense, notre pays procédait à un tir d’essai du futur missile M51 dans les Landes, porteur des nouvelles armes nucléaires françaises. Quelques jours après, c’est en Bretagne que Nicolas Sarkozy présentait le nouveau missile ASMPA (missile air sol moyenne portée améliorée).
Dans les orientations gouvernementales affichées, un alignement sur les positions les plus contestables de l’administration Bush se dessine, ainsi qu’une intégration plus poussée de la France dans l’Otan.
En ce qui concerne la construction européenne, la priorité est mise partout sur les aspects militaires et sur une implication accrue avec l’Otan. Le Traité sur l’Union Européenne dit « simplifié », qui serait proposé à la prochaine Conférence intergouvernementale d’octobre, comporte des éléments qui ont déjà été rejetés par référendum, comme le lien organique avec l’Otan, l’incitation à l’accroissement des dépenses militaires ou la doctrine d’interventions extérieures dites « préventives. »
Concernant l’arme nucléaire, le Président la qualifie de « garant de la sécurité de la France». Or il est évident que fonder sa propre sécurité sur la possession et le développement de l’arme nucléaire encourage la prolifération qui accroît les risques de guerres et de catastrophes. De plus, la modernisation de la force de frappe française contrevient au droit international, notamment aux engagements du Traité de non- prolifération nucléaire (TNP).
Dans toutes ces orientations, la progression du commerce des armes et l’accentuation du caractère militaire de la sécurité dans les relations internationales, poussent à un accroissement inquiétant des dépenses militaires. Cela apparaît très clairement dans les instructions données pour le Livre blanc. Cela participe d’une relance de la course aux armements.
Pour autant, l’expérience montre bien que l’accumulation des armes n’offre aucune garantie pour la sécurité, ni pour la prévention et la résolution des conflits, comme par exemple au Moyen Orient pourtant premier acheteur des armes produites en France …
Certaines initiatives et propositions méritent certes l’attention et pourraient permettre des avancées.
La Conférence de juin sur le Darfour a permis de débloquer une situation très complexe.
La Conférence de juillet sur le Liban a pu aider à la reprise du dialogue entre les parties en conflit.
L’idée avancée d’une Union Euro-Méditerranéenne pourrait être bonne si elle s’accompagnait d’une nouvelle attitude de la France dans ses relations avec les pays du Maghreb et de l’Afrique sub-saharienne. Il faut bâtir une véritable politique de développement en coopération solidaire, rompre avec la FrançAfrique et avec le traitement indigne des populations immigrées.
De grandes questions sont totalement absentes de l’orientation gouvernementale : rien en faveur d’une relance du désarmement nucléaire, de la mise en œuvre ou de la création de nouveaux traités en particulier sur le commerce des armes. Rien non plus sur la promotion du multilatéralisme et le renforcement du droit international et des Nations Unies.
A ce sujet, les déclarations récentes de Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères sont inquiétantes, à la fois sur la faiblesse du refus de la guerre comme solution, mais surtout sur l’idée d’une mise à l’écart de l’Onu dans la résolution d’une crise d’autant plus grave qu’elle contient le risque d’utilisation d’armes nucléaires dans une région du monde qui en est truffée. De plus elle fait fi du travail d’expertise indépendant mené par l’AIEA et des recommandations qui en découlent.
La véritable croisade qu’il accomplit auprès des chancelleries européennes pour les convaincre d’adopter des sanctions contre l’Iran en dehors de l’Onu constitue une grave rupture avec le travail patient entrepris par la France auprès de ses partenaires vis-à-vis du programme nucléaire iranien. Cette mise en œuvre d’une pratique très atlantiste, revient à fragiliser le système multilatéral de sécurité au profit de l’Otan, une alliance militaire archaïque qui n’a plus lieu d’être.
Ce brusque alignement de la diplomatie française sur la stratégie de Georges Bush plonge le monde dans la stupeur. Elle est incohérente et s’inscrit à contre-courant de l’opinion majeure sur la planète attachée au droit et à la justice. Menacer de passer outre l’Onu et mettre en cause les efforts de l’AIEA, c’est fragiliser le système de sécurité international et ses traités.
La prolifération nucléaire est un problème très grave qui menace à terme la survie de l’Humanité. La seule prévention, c’est l’élimination de l’arme atomique. Le Mouvement de la Paix qui a été créé au lendemain des tragédies d’Hiroshima et Nagasaki continue d’en faire une de ses priorités pacifistes. L’existence même des armes de destructions massives qui éliminent sans discernements les civils et les militaires, les êtres humains et la nature, est incompatible avec la culture de paix.
Oui, il faut éliminer toutes les armes nucléaires et empêcher toute nouvelle acquisition par qui que ce soit. Mais cela ne peut se faire par la guerre. Prendre prétexte de manquements d’un pays au Traité de non-prolifération en y contrevenant soi-même par la poursuite de la modernisation de ses armes et par de nouveaux programmes n’est pas crédible.
On ne pourra plus longtemps justifier la détention de l’arme atomique pour notre sécurité en l’interdisant aux autres. Aux deux poids deux mesures actuelles, nous répondons « deux poids une mesure, élimination de toutes les armes nucléaires ».
Le Mouvement de la Paix appelle donc aujourd’hui chacune et chacun à réagir à ces orientations et à intervenir dans les choix décisifs qui sont en train d’être élaborés en matière de défense et de sécurité, tant pour la France que pour l’Europe et le monde.
Les défis qui sont devant nous appellent à rompre avec des politiques passées. L’élaboration d’un monde plus pacifique invite au dialogue, au partage des savoirs et des ressources, à la coopération de tous pour préserver la paix et l’environnement, et assurer à chaque peuple et à chaque être humain ses droits fondamentaux.
Le Mouvement de la Paix s’engage à favoriser par tous les moyens l’expression citoyenne dans ces domaines vitaux de la paix et de la sécurité. Il a rédigé « 30 Urgences pour cultiver la paix », véritable « livre arc-en-ciel », qu’il propose comme sa contribution au Livre blanc de la Défense, et demande à être entendu par la commission chargée de l’élaborer.
Le 21 septembre, est maintenant la Journée internationale de la paix. Elle sera en France et dans le monde l’occasion de nombreuses actions.
Dans sa résolution 55/282, l’Onu « Engage tous les Etats Membres, les organismes des Nations Unies, les organisations régionales et non gouvernementales et les particuliers à célébrer comme il convient la Journée internationale de la Paix, y compris au moyen d’activités d’éducation et de sensibilisation, et à oeuvrer, de concert avec l’Organisation des Nations Unies, à l’établissement d’un cessez-le-feu mondial ».
Depuis 2002 que cette journée est fixée, sa montée en puissance est progressive. Le Mouvement de la Paix entend en faire un moment fort de l’intervention citoyenne pour la culture de paix. La paix, c’est un processus permanent. Elle doit devenir une véritable culture pour les femmes et les hommes de cette planète.
Pour l’édition 2007, le Mouvement de la Paix a redoublé d’efforts pour donner à cette journée le retentissement qu’elle mérite. Le Mouvement de la Paix qui recense plus d’une centaine d’initiatives de ses comités locaux, crée un site Internet (www.21septembre.org) et publie avec plus de 20 partenaires une nouvelle affiche.
Le site Internet se veut à la disposition de tous ceux qui participent à cette Journée internationale de la Paix pour populariser leurs projets. Ils y trouveront les éléments officiels, le moyen de faire connaître leurs initiatives, des aides concrètes et la possibilité de les valoriser par la suite. Nous souhaitons que ce site se développe d’année en année et soit un moyen de donner de la lisibilité à cette journée.
L’affiche signée de Léo Kouper, un des plus grands affichiste français est le signe d’une coopération importante de mouvements et d’associations. Elle donne de la crédibilité à cette Journée internationale.
Avec ses deux outils, nous encourageons chacune et chacun, les associations, les collectivités et les institutions à promouvoir cette journée décidée par l’Onu. Il n’est pas obligatoire de réaliser de gros évènements. L’important c’est de dire qu’il existe une Journée internationale de la Paix à l’initiative de l’Assemblée générale de l’Onu et de donner confiance dans la capacité de chacun de s’y investir selon sa propre sensibilité.
Parmi les initiatives marquantes, on peut noter le lancement de ballon à l’occasion du match de Rugby France/ Irlande, la péniche de la paix sur la Seine dimanche 23 à Paris. Ailleurs, ce sont des débats comme à Dijon et Bagnolet, des expositions comme à Saintes, la Rochelle ou la Courneuve, des fresques comme à Vénissieux, des concerts comme à Clamecy. A Grenoble sera inauguré le Triporteur de la Paix. Des arbres de la Paix seront plantés à Sainte Tulle ou Marseille. De nombreux établissements scolaires sont investis dans les Alpes de Haute Provence, les Bouches du Rhône, le Maine et Loire avec l’inspection académique, la Nièvre, la Haute Garonne, …
Toutes les initiatives sont recensées sur le site www.21septembre.org
De nombreuses collectivités s’impliquent durablement comme le conseil régional PACA, le Conseil général de la Seine St Denis, les villes de Vitry sur Seine, Malakoff, Aubagne, …
Vous le voyez le 21 septembre, ça bouge en France pour la Paix.
Aujourd’hui dans le cadre de la Journée internationale de la Paix, nous avons le plaisir de vous annoncer la naissance de l’Université Populaire de la Culture de Paix. Comme mouvement d’éducation populaire, ce projet du Mouvement de la Paix entend répondre aux besoins d‘outils de formation pour la Culture de Paix.
Cette université est conçue comme les universités du temps libre pour tout public. La première conférence aura lieu le 26 octobre sur la genèse de la notion de Culture de Paix, à Via le Monde à Bobigny. Elle accueillera Ingeborg Breines, norvégienne, directrice du bureau de liaison de l’Onu à Genève qui était dans l’équipe de Fédérico Mayor à l’Unesco, et Claire Stark, responsable du la culture de Paix actuellement à l’Unesco.
Ce projet sera progressivement étendu à toute la France. Elle devrait répondre au travail de formation et d’approfondissements que nécessite la construction de la paix comme matrice d’un nouveau monde en gestation.
Notre action ne s’arrête pas à la promotion du 21 septembre.
Notre conseil national a décidé de mettre le Mouvement de la Paix en position très active pour répondre aux exigences de la situation actuelle que j’ai développées au début de mon intervention.
Nous avons proposé à nos partenaires de la Campagne pour le Désarmement nucléaire, une campagne de meetings nationaux dans les 15 plus grandes villes de France sur le thème « Pour un Monde solidaire, sans armes nucléaires » avec des intervenants nationaux et internationaux.
Ces meetings se tiendront en vue de préparer une journée internationale d’actions autour du 8 décembre prochain, qui marquera les 20 ans du premier accord de désarmement nucléaire. Il portait sur les missiles Pershing et SS20 stationnés en Europe contre lesquels des millions d’Européens s’étaient mobilisés.
Pour le Mouvement de la Paix, cette campagne ambitieuse de meetings devrait permettre de donner aux citoyens l’occasion de s’exprimer plus fortement pour la paix et la résolution politique des conflits. Elle s’inscrit dans la continuité de la semaine internationale contre la militarisation de l’espace du 4 au 13 octobre et de la semaine de l’Onu pour le désarmement du 24 ou 31 octobre.
Les relents de bruis de bottes sous-jacents des dernières déclarations de Georges Bush ou Nicolas Sarkozy nous renforcent dans cette détermination à tout mettre en œuvre pour cultiver la paix du quartier à la planète.
Devant ces défis et ces échéances, le Mouvement de la Paix appelle les citoyennes et les citoyens, quelles que soient leurs opinions, à prendre part à ces initiatives et à agir pour inventer un monde qui cultive la paix.
Saint Ouen le 20 septembre 2007
Pierre Villard et Arielle Denis, co-présidents du Mouvement de la Paix
arielle.denis@mvtpaix.org 06.87.14.89.33
pierre.villard@mvtpaix.org 06.82.92.29.46


