Plénière sur les propositions finales :
« Discussion sur les activités communes comprenant les élections européennes, l’anniversaire de l’OTAN en 2019, la fin de la 1ère guerre mondiale, la modernisation des armes nucléaires (bombes US B61-12), les campagnes contre les chasseurs F-35, et la consigne de passer à 2% du PIB pour les dépenses militaires. »
Panélistes:
Pat Elder (World Beyond War, USA), Katrien Neyt (ABVV/FGTB, Belgium), Édith Boulanger (Non à l’OTAN, Non à la guerre, France), EwaGroszewska (Social Forum of Exchanging Opinions, Poland), Reiner Braun (IPB, Germany)
Modération: Lucas Wirl (Ialana, Germany)
L’OTAN commémorera ses 70 ans en 2019, le Mouvement de la Paix, né juste après la 2ème guerre mondiale, les a commémorés en 2018, le collectif français “Non à l’OTAN – non à la guerre” fonctionne depuis 10 ans, depuis le début de la guerre en Afghanistan et le retour de la France dans les instances stratégiques de l’OTAN.
Dans la 1ère guerre mondiale, 82 pays étaient impliqués et elle a duré 4 ans. Or actuellement, 100 ans plus tard, 120 pays sont impliqués dans la guerre en Syrie qui dure déjà depuis plus longtemps que chacune des deux guerres mondiales.
Mais si la situation au Proche et Moyen Orient est ce qu’elle est, c’est en grande partie à cause des traités conclus après la chute de l’empire ottoman : traité de Sèvres en 1920 et celui de Lausanne en 1923 qui a découpé l’empire ottoman et cette région. En 2018, Georges Corm, ancien ministre libanais,constate : « Nous sommes dans l’affrontement de deux blocs géopolitiques : celui de l’OTAN d’un côté et l’axe contestataire de la suprématie américaine du monde, soit celui de la Chine, de la Russie, et de l’Iran, de l’autre »
L’OTAN forte de ses 29 membres est très présente dans les différents conflits, soit indirectement par toute sa logistique (par exemple par l’utilisation des radars AWACS) soit directement par l’intermédiaire des militaires sur le terrain ou lors de bombardements(armées des États-Unis, de Grande-Bretagne, de France, Turquie), et à travers ses différentes bases militaires implantées en Europe et en Afrique notamment.
Lutter contre l’OTAN, c’est lutter contre les politiques bellicistes des différents pays de l’OTAN.
Lutter contre l’OTAN, c’est lutter contre la militarisation de son propre pays.
En France, le 28 juin dernier, le Sénat français a adopté, par 326 voix pour, et 14 voix contre, le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025, loi qui prévoit notamment le doublement du budget des armes nucléaires, sa modernisation, le remplacement de Sous-Marins Nucléaires Lanceurs d’Engins (SNLE). Cette loi réassure la politique de dissuasion par l’arme nucléaire et réaffirme sa dépendance à l’OTAN. Emmanuel Macron qui dès son élection, avait annoncé un nouveau « Livre Blanc de la Défense » pour 2019 a fait élaborer la « Revue Stratégique de la Défense et de la Sécurité » en octobre 2017, sans attendre 2019, mettant en avant la militarisation de sa politique.
Le Mouvement de la Paix a publié un livre « le Livre Blanc pour la Paix” dont la 2ème édition actualisée vient de paraitre et qui est disponible ici. Le sondage en juin dernier « les français, les dépenses militaires et l’élimination des armes atomiques » réalisé par l’IFOP pour le Mouvement de la Paix auprès de 1001 personnes montre bien, depuis le dernier sondage fait en 2012, la montée de ce militarisme dans les esprits de nos concitoyens.
Lutter contre l’OTAN, c’est lutter contre le développement d’une Europe de la Défense
Il est à noter qu’une Europe de la Défense serait tout aussi illégale que l’OTAN au regard du Droit international.
La question du partage par la France de son armement nucléaire avec l’Allemagne n’est plus aussi tabou que cela l’a été. Sa faisabilité a même été étudiée par le Parlement allemand dans l’hypothèse d’un désengagement états-unien en Europe ou pour d’autres raisons.
Actuellement les accords franco-allemands concernent surtout l’aviation : la base aérienne d’Évreux va accueillir à l’horizon 2021 la première unité aérienne binationale franco-allemande de transport tactique. La coopération en matière de transport aérien est déjà présente au Sahel (opérations Barkhane et MINUSMA) et pourrait doubler dans un avenir proche.
Des engagements au sol au Sahel ne sont pas à exclure dans le cadre de la brigade franco-allemande.
Un projet franco-allemand d’un chasseur bombardier remplaçant l’Eurofighter et à terme le Rafale est en cours de discussion.
Le Brexit ne devrait pas remettre en cause les accords militaires déjà passés en Europe, en bilatéral avec la France (4 traités) par exemple, ni avec l’Union Européenne.Ces accords bilatéraux se placent évidemment sous la tutelle de l’OTAN du fait de l’intégration des moyens militaires de toute nature et de la mutualisation des coûts.
Pour tester l’efficacité de ces moyens, l’OTAN multiplie en Europe des manœuvres (49 manœuvres de l’OTAN planifiées en 2018) sur plusieurs territoires nationaux impliquant des unités transnationales mais l’expérience a montré l’existence de multiples problèmes pratiques. Des mesures seront donc prises, par exemple pour éliminer les difficultés du passage de frontières, améliorer la qualité des routes, des ponts, des aéroports, etc. Adoptée fin 2017 lors d’un Conseil de l’UE sur « proposition » de l’OTAN, la PESCO, « coopération structurée permanente » en matière de défense impose des dispositions permettant la mobilité des armées de l’OTAN en Europe (élargissement des ponts, des différentes voies terrestres, etc.) et la sécurisation des routes maritimes et aériennes transatlantiques.
La PESCO est pilotée par deux nouvelles structures de l’OTAN : un « Commandement pour l’Atlantique » pour la sécurité des liaisons transatlantiques et un « Commandement pour la mobilité des troupes » en Europe. Des troupes mixtes sont prépositionnées en Europe du Nord, en Europe centrale et orientale.
Comme on peut le voir, la militarisation de l’Europe, et plus particulièrement de l’Union européenne, est en marche forcée rapide et la France en est un des moteurs. Le 25 juin 2018 : 9 états membres s’entendent pour une I.E.I., Initiative Européenne d’Intervention, portée par la France pour intensifier la collaboration militaire.Renforçant la défense de l’Europe, l’IEI contribuera à l’OTAN par un meilleur partage des efforts de défense. L’IEI s’inscrit en pleine complémentarité avec l’action de l’Union européenne, en particulier la coopération structurée permanente (CSP ou PESCO), principalement orientée vers le domaine capacitaire. Distincts, ces deux dispositifs vont ainsi s’entretenir et se consolider mutuellement. Le Secrétaire général de l’OTAN a reconnu que les initiatives prise par les Européens étaient des contributions réelles, très concrètes au partage du fardeau, partage réclamé par les États-Unis.
Lutter contre l’OTAN, c’est aussi lutter contre le commerce des armes
L’OTAN est certainement le principal outil du développement du commerce,florissant et indécent, des armes, surtout états-uniennes, 1er marchand d’armes, la France talonnant la Russie étant le 3ème.
C’est pour cela que le Mouvement de la paix a organisé et a participé aux rassemblements devant le salon Eurosatory à Villepinte et à Paris, a marché avec des Européens, a fait signer des pétitions en juin 2018 contre ce salon, 1er salon international de l’armement et de la sécurité.
Nous devons lutter pour le respect du Traité du commerce des armes (Décembre 2014) et la transparence de la vente d’armes.Il apparait que sur les demandes faites aux industriels français par des clients étrangers, 98 % sont acceptées par les services du premier Ministre. Ce nombre important est-il vraiment légitime ? Nous devrons exiger plus de transparence sur ce sujet. Un rapport fait par un cabinet d’avocats, Ancile (voir le numéro de Planète Paix de mai 2018) insiste sur l’illégalité de la vente des armes aux pays impliqués dans un conflit.(par exemple à l’Arabie Saoudite en guerre contre le Yémen). Un nouveau rapport de la Ligue des Droits de l’Homme dévoile,début juillet 2018, comment l’État et plusieurs entreprises françaises ont fourni des équipements, matériel militaire et de surveillance, ayant servi à la sanglante répression égyptienne des cinq dernières années par le régime d’Abdel Fattah al-Sissi.
Cela confirme ce que nous avons toujours affirmé, que le commerce des armes n’est pas un commerce comme les autres et qu’il relance la course aux armements, grave danger pour la paix et pour l’environnement (le plus gros pollueur sur notre planète étant les armées, en temps de guerre comme en temps de paix). Nous devons relancer avec force l’exigence d’un embargo dans les zones de guerre.
D’après le SIPRI, il apparait clairement que les marchés d’armement viennent alimenter les zones de tensions dans le monde, même si nous assistons depuis 9 ans à leur stagnation à très haut niveau, 1700 milliards de $ de dépenses d’armement dans le monde.Seule change la répartition entre les différentes régions autour du monde.
Lutter contre l’OTAN c’est aussi lutter pour créer en Europe une Zone Exempte d’Armes Nucléaires, ZEAN
Il faut que chaque pays signe et ratifie le Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires, le TIAN : aucun des membres de l’OTAN ne l’a signé. D’où notre décision d’organiser une mobilisation le 14 octobre prochain en France « sur les lieux du crime », c’est-à-dire symboliquement à proximité des lieux où sont fabriquées, stockées, mises en alerte, … les bombes atomiques françaises (L’Ile longue en Bretagne, Istres, Le Barp, Avord, Valduc, Paris, …)
Selon un sondage réalisé en France en juin 2018,67 % des Français sont favorables à la ratification du TIAN et 76% sont favorables à ce que la France « s’engage dans un processus international d’élimination totale et contrôlée des armes atomiques, tel que prévu par les Nations Unies ». Mais, dans le même temps, seuls 18% sont favorables à une diminution des dépenses de défense contre 37% en 2012.
La lutte contre les armes nucléaires est totalement intégrée dans la lutte contre l’OTAN, l’OTAN qui est le plus important propriétaire de bombes atomiques sur le sol européen.
Lutter contre l’OTAN, c’est aussi proposer de remettre à jour l’acte final d’Helsinki
Daté de 1975, il fait des préconisations pour une sécurité active en Europe. C’est ce que nous appelons Helsinki 2, que nous avions déjà évoqué lors du dernier contre-sommet en 2017.
Lutter contre l’OTAN, c’est aussi, à l’occasion des élections européennes de 2019, faire connaitre tous les méfaits de cette Organisation militaire illégale selon le Droit international.
Depuis la chute du mur de Berlin et les changements qui l’ont accompagné en Europe, l’adhésion d’un pays à l’OTAN précède toujours l’éventuelle adhésion à l’UE. L’UE est une des grandes superstructures soutenant l’OTAN. Ces élections devront être la raison d’une très grande mobilisation dans chacun de nos pays, en intégrant dans ces projets d’initiatives à prendre les 70 ans de l’OTAN, la tenue d’un Tribunal Permanent des Peuples sur les crimes de l’OTAN et bien sûr le contresommet maintenant entré dans les traditions des membres de notre collectif international.
Lutter contre l’OTAN, la plus grande machine de guerre dans le monde, c’est lutter pour les 8 domaines d’action de la Culture de la Paix
Cela commence par l’éducation qui va dans le sens de la résolution pacifique des conflits, du dialogue, de la recherche de consensus et de la non-violence. Le sondage fait en juin 2018 montre bien que l’aspiration à la paix et à la non-violence, et aux moyens d’y parvenir, s’accroit globalement avec le niveau d’éducation.
Édith Boulanger
Bruxelles, le 8 juillet 2018
Compte-rendu général rapide du contre-sommet de l’OTAN 2018 (en PDF)
Compte-rendu de l’atelier n°7 animé par Yves-jean Gallas (en PDF)


