FSE 2003 : plénière “Construire la Paix, une ¨Culture de la Paix, désarmement global, droit international” – Intervention de Pierre Villard, coprésident du Mouvement de la Paix

 

 

 

 

FSE 2003 : plénière “Construire la Paix, une ¨Culture de la Paix, désarmement global, droit international”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Intervention de Pierre Villard, co-président du Mouvement de la Paix – 14/11/2003

Le monde est dans une situation inédite appelant des réponses neuves aux aspirations à la paix, à la justice, au développement, à la démocratie, …

Ces derniers mois ont vu ressurgir la Paix comme une des préoccupations essentielles des peuples au quatre coins du monde.

La Paix, non pas comme l’absence de guerres, mais comme socle commun d’une civilisation nouvelle à dimension humaine.

Le Mouvement de la Paix entend développer en France et dans le Monde réflexions, propositions et actions pour que ces mobilisations de refus de la guerre comme solution aux conflits débouchent sur des mobilisations capables d’agir sur leurs causes.

Pour s’établir durablement la paix concentre nombre des défis lancés à l’humanité pour survivre à la crise de son développement.

Pas de paix durable sans partage des richesses et des savoirs.

Pas de Paix durable sans justice et sans démocratie à tous les niveaux de responsabilités des citoyens.

Pas de paix durable sans pleine jouissance des droits, sans un environnement soigneusement protégé, sans accès à la culture et à une éducation capable de forger des citoyens libres et responsables.

Toutes ces questions sont débattues au Forum Social Européen.

Or, si ce qui fait la caractéristique de la construction de la paix est aujourd’hui sa transversalité, cela peut être aussi un handicap  : la paix est certes le fruit de la convergence de ces exigences, pourtant elle ne saurait attendre leurs réalisations pour se poser comme objet de mobilisation.

La Paix sera-t-elle le résultat des changements du Monde ou la Paix comme projet global peut-elle être porteuse de la construction d’autres mondes ?

Deux impératifs soulignent l’urgence de mieux mettre en débat la construction de la paix au sein des Forums sociaux .

Premièrement, si les forces du chaos l’emportaient, – celles qui consciemment ou insidieusement préparent les guerres de demain et prolongent celles d’aujourd’hui- cela rendrait impossible la réalisation des objectifs d’égalité et d’universalité portés par ce mouvement. C’est donc ici et maintenant qu’il faut les mettre en échec et ce dans toutes leurs dimensions, économiques, politiques, idéologiques et culturelles.

Deuxièmement : tout mouvement qui porte le projet d’un changement radical ne peut faire l’économie d’une réflexion sur les formes et les moyens d’action pour y parvenir.

Très majoritairement les forces qui animent les forums sociaux ont mis la démocratie, la mise en mouvement majoritaire des citoyens au cœur de ce projet. Mieux, elles en promeuvent de nouvelles formes dont la démocratie participative ou l’extension du contrôle public à tous les biens fondamentaux. La violence – quelques soient les motifs au nom desquels on l’utilise – ne montre toujours qu’elle-même . Elle n’est pas de notre bord, elle ne peut être de notre fait.

La fin ne justifie pas les moyens. Nous avons la responsabilité collective de mettre en pratique les valeurs et les principes qui nous inspirent. Les pacifistes et les non-violents qui considèrent la paix comme une « culture »  pourraient enrichir ce débat.

La force propulsive de la paix se conçoit encore trop dans l’opposition à la guerre. Le refus d’une guerre annoncée, comme celle contre l’Irak, a mobilisé des millions de gens. Dans cette mobilisation l’idée d’empêcher la guerre n’a-t-elle pas été aussi mobilisatrice que le refus de la guerre ?

Je le pense.

Pour la première fois de leur histoire les peuples du Monde ont expérimenté ce que pourrait-être une culture de Paix par la prévention des conflits. Le 15 février une véritable Hola pour la Paix a fait le tour de la Terre. Ce fut inédit, historique et je ne suis pas sûr que tous mesurent ce que cela signifie comme changement en profondeur des comportements.

Depuis Florence le FSE a montré sa capacité à unir les peuples contre une guerre. Depuis, un nouveau souffle parcourt le forum social où se retrouve le refus des réponses militaires, des projets de militarisation de l’Europe ou la dénonciation de la loi du plus fort dans les relations internationales. Le défi réside dans la capacité de ce mouvement à passer du « contre au pour » qu’il s’agisse de l’ONU, de son rôle comme point d’appui pour la paix du monde, de la question de la violence et de sa dénonciation comme moyen de la politique, de celle du désarmement et du commerce des armes, de la sécurité prise comme « l’ensemble des conditions qui assurent à un individu la satisfaction de ses besoins fondamentaux et la jouissance de ses droits ». Il s‘agit de concevoir la paix non pas comme un état de non-guerre mais comme un projet de civilisation. Une anecdote à ce propos : le mot « paix » ne figurait pas comme mot-clé pour inscrire un séminaire dans le Forum social…

La question est cruciale : comment transformer le désir de paix en action durable pour prévenir les conflits de demain ? Mettre fin aux vingt trois conflits sanglants qui défigurent la planète et aux innombrables violences commises à l’égard des plus faibles ? La transformation du mouvement anti guerre en mouvement pour la paix , oblige à pénétrer plus avant dans la réalité : se confronter à ses contradictions, à sortir de l’anathème, de la pétition de principe, comprendre et agir sur la complexité des conflits et des rapports de force, du quartier à la planète, construire collectivement les étapes qui mèneront à « la société sans la guerre ».

Le Mouvement de la paix a préparé ce FSE dans l’espoir d’y rendre plus visible et plus lisible les analyses et les actions des mouvements dédiés à la construction de la paix, en France en Europe et au-delà.

En conclusion :

Ce que chacun sait c’est que nous vivons sur une même planète. Cette planète est fragile comme le sont les êtres humains qui la peuplent et qui sont le résultat d’évolutions millénaires. Ce que beaucoup mesurent également c’est que la course effrénée au profit nous mène dans une dramatique impasse. La loi du fric a du plomb dans l’aile même si elle se porte encore bien.

Ce monde en pleine turbulences cherche sa voie, cherche ses voix. Des contradictions fortes le traversent. Des espoirs rassembleurs le colorent.

La culture de guerre montre son incapacité à résoudre durablement les conflits. Elle les fragilisent davantage en creusant les inégalités, en développant les injustices, en niant les droits humains, en perturbant les équilibres environnementaux. Les victimes de cette culture de guerre relèvent la tête et retroussent leurs manches pour construire d’autres futurs humains.

Les résistances ne datent pas d’aujourd’hui mais de nouvelles convergences sont en train de naître qui devraient changer durablement les rapports qu’entretiennent entre eux les acteurs de ces changements.

Reléguée dans un premier temps comme infime préoccupation la Paix est devenue en quelque mois un enjeu majeur. C’est essentiel pour bâtir la maison commune sur un nouveau socle.

La Paix sera-t-elle la résultante de tous les combats pour les droits humains ou bien l’action pour la Paix permettra-t-elle de conquérir une nouvelle dignité et de nouveaux droits ?

La culture de Paix ne porte-t-elle les germes d’une nouvelle civilisation ?

L’action pour la Paix comme culture de civilisation est de nature à rassembler dans leur diversité les acteurs du champ social.

Le Mouvement de la Paix lance un appel à un large rassemblement pour s’opposer aux guerres et construire la Paix, en respectant la grande diversité d’approche qui s’expriment et à faire du 20 mars journée mondiale contre la guerre en Irak, la fin de l’occupation et pour la souveraineté du peuple irakien une grande journée de mobilisation pour que l’Europe s’inscrivent dans une politique de Paix.

Humanistes, syndicalistes, pacifistes, féministes, écologistes, … Ensemble, nous avons autant de ponts à construire que de murs à détruire pour nous construire un avenir de justice, de solidarité, de droits et de Paix.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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