14 juillet : Lettre au Président de la République

Monsieur Le Président de la République française,

Présent à Paris le 11 juillet 2022 pour une visite de l’Unesco par de jeunes lycéens afin qu’ils s’imprègnent des valeurs, principes, objectifs et projets de cette institution internationale qui s’applique à mettre en œuvre la Charte des Nations Unies dans son domaine d’action, nous avons assisté durant l’après-midi à un ballet d’avions militaires dans le ciel de Paris, sorte de préliminaire au défilé du 14 juillet.

Continuer à faire de la fête nationale un moment d’affirmation de la puissance militaire de la France, c’est en fait tourner le dos aux valeurs de la République française et aux valeurs et aux principes essentiels de la Charte des Nations unies.

La fête nationale devrait être le moment de faire, au nom du peuple français, des propositions audacieuses pour le droit de l’homme à la paix et au bonheur.

Dans un courrier en date du 14 janvier lors de votre prise de fonction de président du conseil de l’Union européenne nous vous alertions en indiquant « Nous pensons que, face aux problèmes qui se posent aujourd’hui, les solutions ne peuvent être que politiques et diplomatiques et sûrement pas militaires. Face aux défis climatiques, sanitaires, ou économique la solution, n’est pas dans un processus de surenchère militaire, ni la compétition tous azimuts dans tous les domaines – y compris militaire – mais dans la mise en œuvre pleine et entière de la Charte des nations Unies et dans l’application du droit international en ce qui concerne le désarmement. L’heure est au rassemblement de l’humanité toute entière à travers la mise en place de coopérations dans tous les domaines. L’UE doit prendre des initiatives marquantes pour s’engager dans cette direction au lieu de rester enfermée dans le double carcan d’un néolibéralisme destructeur des solidarités sociales et humaines et le carcan de la militarisation qui se traduit par une augmentation incessante et dangereuse des dépenses militaires boostée par notre dépendance à l’Otan à travers l’article 42 du Traité de Lisbonne. »

Le 28 février dans un autre courrier nous condamnions l’invasion de l’Ukraine par la Russie et demandions le retrait des forces russes d’Ukraine, un cessez-le-feu immédiat et des initiatives diplomatiques et politiques pour une solution négociée.

Dans le même courrier nous regrettions votre déclaration selon laquelle la guerre allait durer ; ce qui semblait indiquer que vous ne croyiez pas aux efforts nécessaires pour faire taire les armées et trouver une solution négociée au conflit en cours en Ukraine. Vous avez réitéré ces déclarations en indiquant que nous devions nous attendre à ce que la France s’engage dans une économie de guerre sur le long terme.

En tant que porte-parole national du Mouvement de la Paix, je tiens à réaffirmer combien nous sommes préoccupés par la situation internationale et constatons les inquiétudes et attentes des Français.

 

Pour ce qui concerne l’Ukraine

Nous avons dénoncé l’agression de la Russie contre l’Ukraine et réaffirmé que la guerre n’est jamais la solution pour résoudre les conflits.

Aujourd’hui la guerre est là avec son cortège de milliers de morts, de massacres, de destructions, d’une catastrophe écologique immense, de millions de personnes poussées sur le chemin de l’exil, dans la souffrance de la séparation et la peur du lendemain. Une fois encore les peuples sont les victimes de la guerre comme Yémen, en Afrique, au moyen orient…, d’une guerre qu’ils n’ont pas voulue et dont la poursuite ne peut que conduire à des conséquences encore plus douloureuses (inflation galopante, réorientation des économies vers des économies de guerre, possible utilisation d’armes de destruction massive, famines, inégalités croissantes, vie chère, misère galopante, aggravation de la crise environnementale …).

Nous estimons qu’admettre de s’engager et de s’installer dans une guerre qui devrait durer plusieurs années n’est pas faire preuve de responsabilité, ni de lucidité.

 

Nous estimons que le 14 juillet pourrait être le bon moment pour que la France fasse des propositions pour l’arrêt de la guerre en Ukraine à travers l’instauration d’un cessez-le feu immédiat, l’engagement de négociations sous l’égide des Nations unies, la mise en place d’une force d’interposition des Nations Unies, le rétablissement des observateurs de l’OSCE. Les accords de Minsk pourraient constituer une bonne base pour engager des discussions.

 

En ce qui concerne les armes nucléaires

La guerre en Ukraine a accentué le danger d’utilisation des armes nucléaires par volonté ou par erreur. Tous les Etats savent combien les conséquences humanitaires de l’utilisation des armes nucléaires sont dévastatrices. Ainsi, aujourd’hui, un désarmement nucléaire est plus urgent que jamais. La conférence de Vienne réunissant les Etats parties au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires a effectivement montré la détermination d’un nombre croissant d’Etats à accroitre leurs actions en faveur de la mise en œuvre du traité sur l’interdiction des armes nucléaires.

Comme ces Etats, nous sommes « alarmés et consternés par les menaces d’utilisation d’armes nucléaires et par la rhétorique nucléaire de plus en plus stridente » et condamnons « sans équivoque toute menace nucléaire qu’elle soit explicite ou implicite et quelles que soient les circonstances » mais aussi « que l’existence des armes nucléaires diminue et menace la sécurité commune de tous les Etats et notre survie même ». Nous partageons donc l’opinion des Etats parties qui estiment dans la déclaration finale que « parvenir à un monde sans armes nucléaires est la seule façon de garantir qu’elles ne seront plus jamais utilisées en toutes circonstances ».

 

Le 14 juillet pourrait être le moment opportun pour que la France, dans le respect de ses engagements au titre de l’article 6 du TNP annonce qu’elle s’engage à signer le traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) et à faire prévaloir ce point de vue au plan international, premier vers pas vers sa ratification par la France.

Dans l’attente de votre réponse recevez, Monsieur le Président de la République l’expression de mes salutations très respectueuses.

 

 

Roland Nivet
Porte-parole national du Mouvement de la paix

Le 13 juillet 2022

 

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